Contre les salaires au mérite, pour des augmentations uniformes
mis à jour jeudi 13 avril 2006

Le discours dominant des médias et des derniers gouvernements en matière salariale est celui qui décrit quotidiennement un fonctionnaire attaché à ses « privilèges » et à son « pouvoir d’achat » quand le reste de la population épouse « les indispensables changements » voire mieux : « les réformes devant lesquelles nous n’avons que trop tardé ». Ce discours devenu hégémonique arrive même à persuader nombre de cadres A de la fonction publique qui, dans cette culpabilisation organisée, en oublient que la fonction publique c’est aussi des cadres B et des cadres C.
Pour ces derniers, dans l’Education nationale en fin de carrière, le salaire s’élève royalement à 1692 euros mensuels (salaire brut à l’indice 378). Ce collègue TOS perçoit donc en fin de carrière le même salaire qu’un professeur après... 3 mois d’ancienneté. Au regard de ces chiffres, nous pensons que les revendications syndicales en matière de salaire ont toutes leur légitimité, surtout quand le SMIC est à 1217,88 euros (mensuel brut), que se multiplient les salaires inférieurs à ce SMIC selon les formes diverses de l’emploi précaire, et qu’augmente chaque année en France le nombre de ceux qui payent l’impôt sur la fortune.
Le salaire au mérite existe, nous le rencontrons dans chaque catégorie.
Les syndicats traditionnels publient souvent les grilles qui suivent mais peu les commentent. Elles traduisent pourtant les inégalités salariales qui ne reposent que sur la volonté de diviser les personnels et de les voir s’affronter par l’intermédiaire des corporatismes syndicaux.
Prenons la grille salariale (tableau 1) des professeurs des écoles, certifiés, CPE, PLP2 qui est commune depuis la loi d’orientation de 1989. Elle s’échelonne de l’indice 348 à l’échelon 657. Le traitement double donc sur l’espace d’une carrière pour celles et ceux qui atteignent la « hors-classe ».
Le système de promotion à trois vitesses (tableau 2) : grand choix/choix/ ancienneté vient augmenter les écarts salariaux pour un même emploi. Il est possible de passer du 1er au 11ème échelon en vingt ans pour les mieux notés par les IEN et les IPR -qui eux, ont obtenu depuis 15 ans de voir leur carrière se dérouler à la plus grande vitesse et viennent à l’automne dernier d’obtenir du ministre Robien une nouvelle revalorisation salariale. Celui qui arrive au 11ème échelon en vingt ans pourra prétendre à la « hors-classe » qui, par définition n’est pas faite pour tous puisqu’elle consiste justement à distinguer les uns de la masse des autres. Sans compter la « hors-classe », le collègue le plus rapide « récolte » 276 999 points d’indice sur une carrière de 40 ans. Celui qui passe toute sa carrière à l’ancienneté « récolte » 262 061 points. Sachant que le montant annuel du point d’indice au 1er novembre 2005 est de 53,711 euros (4,48 par mois, brut), la différence de traitement entre les deux situations est de 14 938 points soit 66 922 euros sur 40 ans de carrière. Cette distinction substantielle relève au final de la seule appréciation de la hiérarchie sur notre travail, le tout par des gens (IEN et IPR) qui se sont donné comme mandat syndical d’échapper au système qu’ils perpétuent pour les autres. Il est donc important de continuer à dénoncer cette situation et à revendiquer l’avancement de toutes et tous à la plus grande vitesse, et d’interroger sur ces questions les inspecteurs qui siègent dans les instances paritaires.
Des revendications solidaires pour l’unité des luttes.
La tradition imposée par les syndicats majoritaires aussi bien dans l’éducation nationale qu’au niveau interprofessionnel est celle des augmentations de salaire en pourcentage. Quand elle veut jouer sur une ligne maximaliste, la direction confédérale de la CGT revendique 5% d’augmentation des salaires ou 5% de rattrapage du pouvoir d’achat.
Regardons la revendication de plus près. Pour celle ou celui (c’est plus souvent celle) qui est au SMIC, l’augmentation de 5% lui « rapporterait » 1692 + 84 = 1776 euros. Pour celle ou celui qui est agrégé « hors-classe » (c’est plus souvent celui), l’augmentation serait de 3674 + 184 = 3858 euros. Grâce à l’action unitaire des salariés les écarts salariaux se seraient ainsi creusés entre le haut et le bas de l’échelle. Les plus mal payés gagneraient 84 euros supplémentaires et d’autres, les mieux rémunérés de l’éducation nationale, 184 euros de plus chaque mois. Et tout cela au nom de l’unité ? Sud éducation est en désaccord avec cette conception des luttes et des revendications salariales. Quand des conflits salariaux voient le jour dans certaines entreprises, il n’est pas rare de voir les travailleurs s’organiser autour de la revendication d’une même augmentation pour tous. Ce fut le cas en 2005 dans le transport aérien ou à Radio France. C’est ce que nous appelons des augmentations uniformes. Elles visent à réduire la hiérarchie des salaires et parce qu’elles sont facilement lisibles, elles peuvent être génératrices d’unité dans les luttes. Dans la fonction publique, il s’agit d’augmenter le nombre de points de la même façon pour tous et non d’augmenter la valeur du point qui elle, creuse les écarts et donne toujours moins à celles et ceux qui ont moins.
Pour l’unité des luttes, 300 euros pour tous, tous pour 300 euros !
Sud éducation Puy-de-Dôme
Tableau 1
Catégories | Éch. | ||||||||||
---|---|---|---|---|---|---|---|---|---|---|---|
Titulaires et stagiaires | 01 | 02 | 03 | 04 | 05 | 06 | 07 | 08 | 09 | 10 | 11 |
Agrégés | 378 | 435 | 477 | 517 | 553 | 592 | 634 | 683 | 733 | 782 | 820 |
Agrégés hors classe | 657 | 695 | 733 | 775 | 820 | "A" | |||||
Bi-admissibles | 365 | 399 | 420 | 441 | 468 | 499 | 526 | 566 | 611 | 657 | 687 |
Instituteurs | 340 | 356 | 365 | 372 | 382 | 389 | 398 | 419 | 440 | 468 | 514 |
CE d’EPS classe normale | 296 | 338 | 358 | 375 | 393 | 414 | 433 | 457 | 481 | 510 | 539 |
AE, CE, PLP1, PEGC classe normale | 320 | 338 | 358 | 375 | 393 | 413 | 433 | 457 | 481 | 510 | 539 |
PEGC et CE-EPS hors classe | 456 | 480 | 509 | 538 | 611 | 657 | |||||
PEGC et CE-EPS classe exception. | 611 | 663 | 694 | 740 | 782 | ||||||
Profs des Ecoles, Certifiés, CPE, PLP2 | 348 | 375 | 394 | 415 | 438 | 466 | 494 | 530 | 566 | 611 | 657 |
Profs des Écoles, Certifiés, CPE, PLP2 H-classe | 494 | 559 | 600 | 641 | 694 | 740 | 782 | ||||
Non titulaires | 01 | 02 | 03 | 04 | 05 | 06 | 07 | 08 | |||
M.A. 1ère catégorie | 348 | 375 | 394 | 415 | 438 | 459 | 483 | 506 | |||
M.A. 2ème catégorie | 320 | 334 | 350 | 367 | 383 | 394 | 415 | 446 | |||
M.A. 3ème catégorie | 271 | 293 | 306 | 320 | 336 | 355 | 373 | 389 | |||
MI-SE | 271 | ||||||||||
Assistants d’éducation | 271 |
Tableau 2 (Professeurs des écoles PE, certifiés, CPE, PLP2)
Passages d’échelons | Avancement | ||
---|---|---|---|
Grand choix | Choix | Ancienneté | |
10 au 11 | 3ans | 4ans 6mois | 5ans 6mois |
09 au 10 | 3ans | 4ans | 5ans |
08 au 09 | 2ans 6mois | 4ans | 4ans 6mois |
07 au 08 | 2ans 6mois | 3ans | 3ans 6mois |
06 au 07 | 2ans 6mois | 3ans | 3ans 6mois |
05 au 06 | 2ans 6mois | 3ans | 3ans 6mois |
04 au 05 | 2ans | 2ans 6mois | |
03 au 04 | avancement automatique : 1an | ||
02 au 03 | avancement automatique : 9mois | ||
01 au 02 | avancement automatique : 3mois |